Un mot, un sens. L'hystérésis.

𝑳’𝒉𝒚𝒔𝒕𝒆́𝒓𝒆́𝒔𝒊𝒔. Ce terme a particulièrement retenu mon attention lors du colloque sur l’emploi des salariés de 50 ans+, organisé par le Ministère du travail le 29 avril 2025.

Ce concept, emprunté à la physique et à l’économie, offre un éclairage intéressant sur les mécanismes qui expliquent pourquoi, malgré les réformes et les initiatives, le taux d’emploi des seniors reste faible en France, notamment après 55 ans (malgré une progression mécanique liée aux réformes de retraite).

En physique, l’hystérésis désigne la persistance d’une déformation dans un matériau, même après la disparition de la force qui l’a provoquée. 

Transposé à l’économie et aux ressources humaines, ce terme décrit un phénomène où un choc initial – ici, la sortie massive et précoce des seniors du marché du travail – laisse une trace durable, qui continue d’affecter l’emploi des seniors bien après la disparition de ce choc.

Pourquoi ce concept s’applique au taux d’emploi des seniors ?

▪️ Chocs passés : des politiques de préretraite dans les années 1980-1990 ont encouragé des vagues de départs anticipés.

▪️Effets durables : ces politiques ont contribué à exclure progressivement les seniors du marché du travail.

▪️Auto-renforcement : les employeurs ont intégré l’idée que les seniors sont « moins employables », ce qui alimente leur mise à l’écart même après des réformes visant à les maintenir en emploi.

▪️Auto-censure des travailleurs : les seniors, ayant intégré ce désengagement précoce comme norme, sont moins enclins à rester actifs ou à se former.

Ce phénomène explique en partie pourquoi les politiques publiques, malgré leurs avancées – comme l’abaissement de l’âge de la retraite progressive à 60 ans, la création du contrat de valorisation de l’expérience ou les accords seniors en entreprise – peuvent peiner à inverser rapidement et durablement la tendance. 

Pour casser ce cercle vicieux, il ne suffit pas d’agir uniquement sur les dispositifs légaux ou les incitations financières. Il est essentiel de :

▪️ Prévenir les sorties précoces du marché du travail en améliorant les conditions de travail et en valorisant les compétences des seniors.

▪️ Maintenir les seniors en activité par des formations continues, des bilans de compétences et un dialogue social constructif, comme le montrent les pratiques innovantes de groupes comme AXA, Safran ou Schneider Electric.

▪️Changer les regards et combattre les stéréotypes par des campagnes de sensibilisation et une communication interne et externe fortes, afin de valoriser l’expérience et l’engagement des salariés expérimentés.

L’hystérésis nous rappelle que les effets des politiques et des pratiques d’aujourd’hui se mesureront sur le long terme, et qu’il faut agir dès maintenant avec constance et détermination : 𝘂𝗻𝗲 𝗱𝗼𝘂𝗯𝗹𝗲 𝘁𝗲𝗺𝗽𝗼𝗿𝗮𝗹𝗶𝘁𝗲́ qui nous invite à une attention immédiate et à un accompagnement sur le long terme.